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LE DESTIN DES HOMMES

tendre. Et s’il y avait eu une assistance de trois cents personnes à la séance au lieu des trois douzaines de fervents de sport que l’on voyait d’ordinaire, c’est que Bardu avait posté deux jeunes gens à la porte avec instruction d’inviter les passants à entrer et que l’admission était gratuite ce soir-là. Dites-leur qu’ils applaudissent le « gros » avait recommandé Bardu.

Son associé disparu, Urgel perdait la moitié de l’argent que son frère lui avait donné pour sa part de la terre paternelle.

Des aventures comme celle-là, ce sont des choses qui arrivent souvent dans la vie. Urgel trouvait qu’il avait payé un peu cher la vieille clé du gymnase. Une belle crapule, un fameux escroc, un fin voleur, se lamentait-il en pensant à Bardu.

Urgel n’en revenait pas d’avoir stupidement perdu $500. Pendant plusieurs jours, il resta comme hébété, ne pensant à rien d’autre et se demandant ce qu’il allait faire maintenant. Comme il n’avait pas de métier et qu’il ne possédait guère d’instruction, la situation était difficile. Force lui fut de travailler comme homme de peine sur des chantiers de construction. La besogne était dure et le salaire médiocre. Malgré la déception qu’il avait éprouvée, il rêvait toujours de la carrière d’homme fort. Il avait découvert une nouvelle salle, le gymnase Potvin. Les journées où il ne travaillait pas et les soirées où il n’était pas trop fatigué, il allait s’entraîner là. C’est ainsi qu’il apprit qu’un promoteur de renom organisait un grand tournoi d’hommes forts au Parc Sohmer. Résolu à tenter sa chance, Urgel alla s’inscrire. Les meilleurs athlètes de la province avaient déjà donné leurs noms. Les prix étaient de $100, $75 et $50 pour les trois premiers du classement. Les autres concurrents recevraient $25. Même s’il ne recevait que