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XIV.



LA veille du jour de l’an, les fils et le gendre des Deschamps se trouvaient réunis chez lui afin de passer tout le lendemain ensemble. C’était là une habitude à laquelle aucun d’eux n’aurait osé déroger. L’on échangeait des souhaits de bonne année et l’on fricotait comme au bon vieux temps. Lorsqu’on repartait, chacun trouvait dans le fond de sa voiture un paquet de vêtements, bas, mitaines, tuques, chemises, confectionnés par Mâço, de quoi tenir les petits chaudement pendant l’hiver.

Entre ses enfants, Mâço avait un faible pour sa fille Caroline. C’était elle qui recevait toujours la plus grosse part de ses cadeaux. La vieille mère employait à tricoter ses nombreuses heures de loisir et, comme résultat, Caroline avait plus d’articles de lainage qu’elle n’en pourrait user durant sa vie. Cette préférence provoquait un peu de jalousie chez ses frères.

Le jour de l’an au matin, Tifa se leva de bonne heure et alla faire un tour du côté de la grange. Comme il revenait, l’idée lui vint de jeter un coup d’œil dans les voitures, sous la remise. Dans la sienne qu’il inspecta d’abord, et dans celles de Raclor et de son beau-frère, il trouva des paquets de vêtements que sa mère avait déposés là la veille au soir. Des trois, celui destiné à Caroline était encore le plus gros. Tifa eut la curiosité de l’ouvrir. Entre autres effets il contenait une demi-douzaine de paires de chaussettes en