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LA SCOUINE

veillé. Celle-ci l’ouvrit fébrilement. Une nouvelle feuille manquait.

— Mais elle y était hier. Vous l’avez donc arrachée ?

La Scouine restait silencieuse. Voyant l’obstination de l’élève à ne pas répondre, l’institutrice à qui répugnaient les punitions, la renvoya à sa place, ajoutant :

— Mais je vous préviens que demain, vous devrez réciter sans manquer un seul mot les deux réponses en tête de la page quinze. Elles sont dans votre livre celles-là.

En s’entendant appeler le jeudi, la Scouine s’avança sans sourciller.

— Votre leçon était dans votre livre hier soir ? interrogea Mlle Léveillé.

— Non, fit laconiquement la Scouine.

Mlle Léveillé lui arracha la grammaire des mains. La page quinze manquait.

— Eh bien, vous l’apprendrez après la classe votre leçon. Vous l’apprendrez dans le livre que vous voudrez, mais vous l’apprendrez, cria la maîtresse enfin fâchée.

À cinq heures du soir, Mâço arriva à l’école et demanda à l’institutrice si elle était folle de garder ainsi sa fille quand elle en avait besoin pour l’envoyer chercher les vaches au champ. Mlle Léveillé tenta d’expliquer ce qui était arrivé, mais Mâço ne voulut rien entendre, répétant seulement qu’elle serait en retard pour traire ses vaches. Mâço amena sa fille. Comme la Scouine allait sortir, Mlle Léveillé lui indiqua une autre leçon pour le vendredi.

Le lendemain, ce fut bien autre chose. Lorsque vint le moment de réciter, trois élèves prétendirent