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IMAGES DE LA VIE

EN FAMILLE


Un camarade, excellent et modeste garçon, qui doit se marier prochainement, me consulte au sujet de l’ameublement de son logis. Le sujet lui est agréable et je m’imagine qu’il m’en parle pour le plaisir qu’il éprouve à causer de ce qui lui tient au cœur plutôt que pour avoir mon avis. Je l’écoute avec joie, car il est toujours intéressant de voir les autres recommencer les rêves que nous avons faits.

Il aura un logement de quatre pièces : une salle à manger, une chambre à coucher, un boudoir et une cuisine. Il me cite le chiffre qu’il se propose de dépenser pour meubler chacune d’elles. Je trouve le montant alloué à la cuisine un peu élevé. Pourquoi, dis-je une pareille somme pour cette pièce ? N’y mettez que le strict nécessaire. Allez-y le plus simplement possible. Évitez l’encombrement. Un poêle, une table, deux chaises, en voilà suffisamment pour votre cuisine. Mettez la balance de votre montant sur la salle à manger qui est la pièce la plus importante.

Mon camarade ne paraît pas satisfait de cet arrangement. Cet ameublement lui paraît trop sommaire.

— Ajoutez-y une boîte à allumettes, lui dis-je, conciliant.

Mais mon copain n’entend pas badinage sur ce chapitre.

— Et si nous voulons veiller sans cérémonie à la cuisine et si nous n’avons que deux chaises, je ne suis peut-être pas pour faire asseoir mes visiteurs par terre. Puis, il y a des intimes que nous pouvons faire manger avec nous et il faut qu’il y ait quelques meubles.

— Manger à la cuisine ! Vous allez manger à la cuisine ?

— Certainement, répond mon camarade, calme mais