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IMAGES DE LA VIE

— Non, non. Il faut que ce soit un homme qui s’occupe de la chose. D’abord, moi je ne veux pas lui parler. Ce serait comme si je lui demandais une faveur. Va la voir et reviens avec mon manteau.

Mais lorsque M. Demers réclama le manteau prêté par sa femme, Ernestine éclata :

— Me prenez-vous pour une voleuse ? Croyez-vous que je serais partie avec des effets qui ne m’appartiennent pas ! Ça fait quatre ans que je travaille comme servante et personne ne peut dire que j’ai seulement pris un mouchoir. Encore moins un manteau. Je l’ai cependant, mais madame me l’a donné et sans que je le lui demande.

— Écoutez, Ernestine, fit M. Demers ennuyé par ce flot de paroles, ma femme m’a dit qu’elle vous a prêté ce manteau et elle m’a chargé de venir le chercher. Je veux le manteau.

— Oh ! madame est de celles qui donnent et reprennent ensuite. J’ai eu d’ailleurs l’occasion de remarquer qu’elle a la mémoire courte. Dans tous les cas, je vais vous le remettre le manteau mais c’est un cadeau que je lui fais à votre femme, car il m’appartient.

Et le mari rapporta le manteau à la maison.

Comme le jour de l’an approchait, Mme Demers se demandait ce qu’elle offrirait bien à sa sœur Cora, sténographe dans un bureau d’avocat. Alors, comme ça, elle songea au manteau vert. « Oui, c’est ça. Ça fera un joli cadeau, un cadeau utile. »

Donc quelques jours avant le premier janvier, elle donna le manteau à sa sœur Cora. Mais celle-ci qui n’aimait pas le vert, enleva le collet d’écureuil et le posa sur un manteau beige qu’elle avait. La première fois que Mme Demers aperçut le collet sur l’autre vêtement, elle ne dit rien, mais elle ne pouvait accepter la chose et lorsqu’elle revit de nouveau sa sœur avec son manteau beige et le collet d’écureuil :