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IMAGES DE LA VIE

Là, dans ce jardin ensoleillé, Aline avait vécu des minutes délicieuses, charmantes, embaumées, des minutes lumineuses.

Le midi, au grand scandale de la grosse tante Martine, Aline avait couru, en jupon, acheter une pinte de lait, sept ou huit maisons plus loin.

— Que vont penser ces gens-là ? criait la corpulente dame dans sa vanité blessée. Jamais plus je ne t’amènerai avec moi, déclarait-elle avec dépit.

Aline revint silencieuse à Montréal, mais sa figure était éclairée comme par un reflet mystérieux. Assise aux côtés de sa tante Martine, elle serrait les lèvres comme si elle eût connu un secret merveilleux et qu’elle eût craint de le voir s’échapper.