heure plus tard, je les entends revenir de loin et je les vois passer. Trente-deux imbéciles au volant de leur voiture klaxonnent glorieusement, triomphalement, stupidement, pour annoncer à la population qu’une fille va se faire déviarger ce soir. (Elle l’est peut-être déjà depuis deux ou trois ans).
La faiblesse mentale, le cerveau rudimentaire de certains campagnards dépasse tout ce qu’on pourrait imaginer. J’en ai connu un — marié et père de famille — qui, par les beaux dimanches d’été, s’amusait pendant une longue après-midi à faire résonner aussi fort que possible le klaxon de son bazou. Et le bienveillant gouvernement lui paie des allocations familiales pour l’encourager à procréer des simples d’esprit comme lui.
Je ne crois pas aux grands mots, aux mots creux et vides, à ces mots qui sont comme des ballons en baudruche, ces ballons colorés que le marchand ambulant vend aux badauds les jours de grande célébration et qui éclatent et deviennent moins que rien lorsqu’on les presse. Je crois à la terre que j’ensemence, à la terre qui produit le blé, les fruits, les fleurs, les grands arbres, à la terre que me nourrit et dans laquelle je dormirai un jour.
La misère est laide, hideuse, haïssable, odieuse, vile. Au lieu de lui ériger un culte, on devrait s’efforcer de la bannir, de la faire disparaître. Au lieu de glorifier, d’exalter la misère, au lieu de dire la sainte misère, on devrait dire la maudite misère. Si l’on prêche aux gens que la misère patiemment soufferte est