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fin de roman

— Le pain quotidien. Il me faut gagner ma vie.

— Quoi, vous n’avez pas un mari qui se charge de ce soin ?

— Je n’ai pas de mari.

— C’est que vous n’en voulez pas, car une femme comme vous devrait avoir autour d’elle une douzaine d’admirateurs qui ne demanderaient qu’à l’épouser.

— Trouver un homme n’est pas la chose difficile. C’est d’en trouver un qui vous convient.

— Il n’y a pas d’homme parfait, affirma-t-il, d’un ton qui n’admettait pas la contradiction.

— J’ai été à même de m’en rendre compte, dis-je en souriant.

Il fit une pause.

— Il me semble que si j’avais la chance de vous voir et si vous pouviez me connaître, que nous nous entendrions. Évidemment, nous sommes étrangers l’un à l’autre. Je ne sais pas votre nom et vous ignorez le mien. Je vois votre figure et vous voyez la mienne. Ce sont peut-être des images trompeuses. Nous pourrions être déçus l’un par l’autre, mais vous me plaisez telle que je vous vois et je serais très heureux de devenir votre ami.

— Comme vous y allez ! Comme vous y allez !

Je regardais sa figure rayonnante de santé, mais je remarquais les premiers cheveux gris de chaque côté de la tête.

— Mais comment se fait-il qu’allant si vite en besogne vous n’ayez pas déjà une femme et une famille ?

— Oh, les événements qui ont marqué ma vie ont eu une tournure étrange. Je vous raconterai cela un jour si nous en avons le temps et si la chose peut vous intéresser. Dans tous les cas, je suis libre et si j’avais une famille