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fin de roman

image sainte avec le mot Merci et son nom, à tous ceux qui ont souscrit pour son cadeau. La tante aperçoit le facteur qui arrête son cheval devant la maison et dépose un papier dans la boîte postale à côté de la route. Aussitôt, elle court le chercher. La lettre est au nom de la nièce. Rendue dans la cuisine : Tiens, pour toi, fait-elle, mais comme l’enveloppe non cachetée bâille, elle l’ouvre sans scrupule et en retire une image.

— Tiens, une image, dit-elle, en regardant le bout de papier coloré qu’elle dépose sur la table. C’est curieux qu’il n’y en ait qu’une seule car j’ai souscrit moi aussi. Elle reprend l’enveloppe, regarde si elle n’en renferme pas une autre. J’ai donné une piastre comme toi. Toi, tu reçois une image et moi je n’en ai pas. C’est vraiment étrange, ça.

Et soupçonneuse, elle regarde sa nièce.

Les jours suivants, elle s’informe à tous les gens pour savoir s’ils ont reçu une image du curé. Tous en ont reçu une. Alors, elle ne sait que penser. A-t-elle été oubliée ? C’est peu probable. Elle songe à quelque manigance de sa nièce pour la priver de la gravure qui lui est due. On lui demande s’il n’est pas arrivé deux lettres. Non, une seule. Puis, est-ce elle ou Zélie qui l’a reçue ? Ces questions l’embrouillent tellement qu’elle n’est plus sûre maintenant que c’est elle qui est allée à la boîte lors du passage du facteur et qu’elle se demande si sa nièce ne lui a pas volé son image. Si elle n’était pas si gênée, elle irait demander une explication au curé.

— C’est toujours à moi que ces choses-là arrivent, déclare-t-elle amèrement. Elle se tracasse tellement qu’elle prend un gros mal de tête.