Sur les figures on voit resplendir la joie, le bonheur que tous ressentent en voyant s’avancer à pas de géant la victoire tant désirée… Pourtant, il y a un endroit où la douleur s’attarde ; c’est pour la chasser, pour réparer le mal qu’involontairement je t’ai fait, que je suis en ce moment auprès de toi… Rita, as-tu songé que là-bas, au château de la Roche-Brune, mes vieux parents pleurent la perte de leur enfant chérie. Je t’en supplie, aie pitié de leur cheveux blancs… dis-moi que tu n’es pas coupable… afin de chasser de leur esprit comme du mien, le doute qui les fait tant souffrir. Ne t’obstine pas à garder le silence qui t’a perdu auprès des juges… réponds à ma prière comme j’ai répondu à la tienne…
À ces mots, des larmes montèrent aux yeux de Rita. Comprenant que son silence deviendrait une cruauté inutile pour ces nobles gens qui eurent pour elle une si généreuse bonté, elle décida à parler :
— Non madame, je ne suis pas coupable de ce crime infâme, Je n’ai voulu qu’échanger ma misérable vie pour une vie qui était devenue d’un prix inestimable pour la France, et aussi pour vous… Voilà ce que le peuple ignorera peut-être toujours, puisqu’il ne me reste aucun moyen de prouver maintenant mon innocence.
— Vraiment ta mort m’apparaît comme un suicide. Pourquoi ne pas avoir crié au juge ton innocence ? Crois-tu qu’il n’aurait pas compris comme moi-même l’héroïsme de ton courage, et puis le retour triomphal de Jean Desgrives t’aurait certainement sauvée.
— Hélas ! tout ne pouvait pas se passer ainsi. Il est un secret que je vais vous apprendre et qui vous fera comprendre les raisons de mon silence. Ce secret, j’aurais préféré l’emporter avec moi au fond de ma tombe. Je sais bien qu’en le dévoilant, il va raviver en mon cœur une blessure que la mort seule peut guérir… J’ai aimé Jean Desgrives d’un amour