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« Le Chant de la Paix »

Presqu'aussitôt des pas résonnèrent sous les dalles de pierre ; surprise, elle prêta plus attentivement l’oreille. Cette fois il n’y avait plus à en douter, les pas devenaient de plus en plus distincts. Mon Dieu, se dit-elle, c’est sûrement le bourreau qui vient, puisque j’ai été condamnée à mourir à l’aube. Si brave fût-elle, son cœur se serra. C’était sous des balles françaises qu’elle allait tomber. C’était surtout l’ignominie de cette mort qui l’effrayait et la faisait souffrir… La porte s’ouvrit. Discrètement une ombre sembla s’y glisser… Rita crut distinguer une femme, mais le voile épais qui lui cachait la figure l’empêchait de la reconnaître.

Prévoyant ce qui pouvait se passer dans l’esprit de la jeune fille, la visiteuse venait de relever son voile. Rita, au comble de la surprise, reconnut la baronne de Castel.

L’émotion fut si vive, que pas un mot ne put sortir de ses lèvres. La baronne touchée par tant de douleur et de détresse, venait de se pencher vers elle.

— Rita, mon enfant, il n’est pas possible que le désespoir ait fait de toi une criminelle ; malgré ton aveu, ta condamnation, le doute a persisté dans mon cœur. J’ai cru comprendre l’héroïsme de ton mensonge, dans la dernière supplication que tu m’adressas… En venant dans ton cachot, j’ai voulu te prouver la pitié que je ressentais pour la fausse misérable, qui n’a pas craint de passer pour la plus abominable des créatures, afin de sauver l’homme qu’elle aimait, et par ce fait permettre à la France de triompher. Ton sacrifice n’a pas été inutile… l’ennemi éperdu fuit de toutes parts. Celui que tu as sauvé semble animé d’une force invincible. Son bras vengeur fauche nos ennemis comme de simple fétus de paille… De partout, la France laisse monter à ses lèvres le cri joyeux de son cœur…