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Roman illustré du « Soleil »
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Lorsque je songe à toutes les tristesses de ces foyers, il me semble entendra les pleurs des enfants et voir leurs mains tendues vers leurs mères impuissantes à les protéger contre le froid et la faim… Alors, il me semble qu’il serait mal de ne pas répondre à leurs plaintes… Malgré toute la torture que me cause cette cruelle séparation, une voix me dit que c’est là mon devoir, que je serais lâche de ne pas l’accomplir. Si ma santé a été altérée par le surmenage qu’exigeait mon rôle d’infirmière, il me reste, soyez-en sûr, assez de forces pour mettre à exécution mon projet.

— C’est Juste, Rita, vos paroles sont l’expression d’un cœur grand et noble. J’admire votre courage. Je suis même bien confus de m’être montré en cette circonstance plus faible que vous. Pardonnez ma lâcheté. L’amour que J’ai pour vous est si grand, voyez-vous, que parfois il me rend égoïste. Je sais que nous n’avons pas le droit, pour conserver notre bonheur, de sacrifier le bien-être des veuves, des orphelins, de tous ces braves soldats qui sont tombés pour défendre leur patrie. Mais enfin pour rendre la séparation moins cruelle, promettez-moi encore une fois, de me garder votre amour afin que je puisse attendre patiemment votre retour. Ce sera là, je l’espère bien, la récompense pour tous les sacrifices que nous imposent les Jours sombres que nous traversons.

— Pour cela, Jean, comptez sur moi, jamais rien ne pourra détruire mon amour… Mon cœur vous appartiendra toujours. C’est justement votre souvenir qui m’aidera à supporter les ennuis de toutes sortes que je ne manquerai pas de rencontrer dans ce long voyage.

— Merci, Rita, fit Jean Desgrives, maîtrisant avec peine l’émotion qui l’envahissait.

Voilà comment la guerre allait séparer Jean et Rita, les jetant, dans des circonstances qui devaient