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DÉBAT


voir, reſueille les eſprits de l’ame, & les rend plus diſpos à faire leurs naturelles operacions : Ou, quand on ſort de ces ſages aſſemblees, la teſte fait mal : on eſt las tant d’eſprit que corps, encore que lon ne ſoit bougé de ſus une ſellette. Toutefois, ne faut eſtimer que les actes de Folie ſoient touſiours ainſi legers comme le ſaut des Bergers, qu’ils font pour l’amour de leurs amies : ny auſſi deliberez comme les petites gayetez des Satires : ou comme les petites ruſes que font les Paſtourelles, quand elles font tomber ceux qui paſſent deuant elles, leur donnant par derriere la iambette, ou leur chatouillant leur ſommeil auec quelque branche de cheſne. Elle en ha, qui ſont plus ſeueres, faits auec grande premeditacion, auec grand artifice, & par les eſprits plus ingenieus. Telles ſont les Tragedies que les garçons des vilages premierement inuenterent : puis furent auec plus heureus ſoin aportees es viles. Les Comedies ont de là pris leur ſource. La ſaltacion n’a ù autre origine : qui eſt une repreſentacion faite ſi au vif de pluſieurs & diuerſes hiſtoires, que celui qui n’oit la voix des chantres, qui acompagnent les mines du joueur, entent toutefois non ſeulement l’hiſtoire, mais les paſſions & mouuemens : & penſe entendre les paroles qui ſont conuenables & propres en tels actes : et, comme diſoit quelcun, leurs piez & mains parlans. Les Bouffons qui courent le monde, en tiennent quelque choſe. Qui me pourra dire, ſ’il y ha choſe plus fole, que les anciennes fables contenues es Tragedies, Comedies & Saltacions ? Et comment ſe peuuent exempter