Page:Labé - Œuvres, t. 1-2, éd. Boy, 1887.djvu/318

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
92
APPENDICE.


« Pour myeux amplifier l’Histoire antique de laquelle Cleopatra (la reine Cléopâtre), ilz (les hommes) s’efforcent souventeffois de l’acoupler à une moderne, par l’exemple de quelque pauvre simplette, ou plus tost de la belle Cordiere de Lyon, en ses safres deduytz : sans qu’ilz ayent l’entendement de considerer, que s’il y a chose en sa vie qui puisse estre taxée, les hommes premierement en sont cause, comme Autheurs de tous maux en toutes Creatures : ny aussi sans pouvoir compenser en elle, les grâces et gentilles perfections qui y sont, a tout le pis qu’on pourroit estimer de ses autres qualitéz, lesquelles, pour resolution, si mauvaises sont, des Hommes sont procedées : et les autres qui sont louables, des Cieux tant seulement. Et par cela, qui désormais voudra blasmer Femmes de sa robbe, regarde, que de soy mesme il ne forge un blason, veu que les Clercs disent du cas de Femmes, Hic et Hœc, Homo. Parquoy, comme lubrique ou autrement vicieux que puisse estre a présent le Sexe Masculin, icelle Cordiere se pourra bien dire Homme : mesmement qu’elle sçait dextrement faire tout honneste exercice viril, et par especial aux Armes, voire et aux Lettres, qui la pourront tousiours relever de toute notte que telz Brocardeurs (cy devant assez promenez) par malice enyeuse se sauroient efforcer de luy donner : ainsi qu’ilz font à toutes, sans exception, de mil autres sornettes si tresapres, que cela bien souvent les préserve, faute d’autres meilleurs propos, de s’endormir à la table. »