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ET LES ŒUVRES DE LOUISE LABÉ.


Tarpéienne n’est pas à côté du Capitole : elle est faite de chacune des marches de l’escalier qui y conduit. Tant que les quatre murs de sa demeure bornent son horizon, elle peut espérer qu’on la laissera en repos ; mais le jour où, touchée par le feu sacré, elle s’éclaire sur un point quelconque de la sphère intellectuelle, malheur à elle ! l’artiste brille, mais la femme brûle.

Les dames lyonnaises paraissent s’être chargées d’entretenir le feu. Riche et sans enfants, Louise Labé, qui pouvait consacrer à l’étude tout son esprit et tout son temps, trouvait dans la société des hommes instruits un plaisir que les autres femmes ne comprenaient guère et que quelques hommes, même dans son entourage, durent être assez fats pour ne pas s’expliquer. La femme ainsi placée contracte une manière nouvelle de parler, d’agir et surtout de penser ; elle a dû d’abord se faire violence pour rejeter un certain nombre d’idées vraies ou fausses, mais reçues, et plus tard elle finit par se trouver quelque peu mal à l’aise avec ses « sœurs, » très nombreuses, qui ne l’ont pas suivie dans son évolution. Insensiblement elle se débarrasse de quelques-unes des petites obligations gênantes imposées par l’usage à la moitié du genre humain, et elle paraît déserter, en quelque sorte, le poste confié à l’honneur de tout le régiment.

Et puis, chez la Belle Cordière, surtout après la publication de ses œuvres, les savants hommes, espèce à part, ne vinrent plus seuls : ils introduisirent à leur suite « seigneurs, gentilshommes et autres personnes de