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ET LES ŒUVRES DE LOUISE LABÉ.


de même que nous ignorons si réellement son mari était, comme on l’écrit partout, beaucoup plus âgé qu’elle : c’est possible, mais ce n’est pas prouvé.

Quoi qu’il en soit, jeune ou vieux, Ennemond Perrin apportait à sa femme un véritable contentement, et voilà sans doute pourquoi Louise s’occupa à chanter « ses ennuis, ses dépits, ses regrets et ses larmes, » tout le cortège des douleurs d’autrefois. Elle met tant d’insistance à nous dire qu’elle écrivit ses vers après la fin de ses malheureuses amours, et il est si naturel au poète heureux de chanter ses « maux passés, » que je daterais volontiers de la lune de miel cette IIIe Élégie toute pleine des « amoureuses noises. » Plus tard, quand elle la relira avant de la donner à l’imprimeur, elle ajoutera quelques lignes pour implorer la pitié des dames lyonnaises (dont elle se moque) et pour les prier de modérer les coups de leur « langue lézarde ; » elle laissera subsister les « seize hivers, » qui servent à marquer la première heure des « ennuis divers ; » mais certainement elle ramènera à un chiffre tenu entre le vrai et le vraisemblable le nombre des étés qui indiquent l’heure présente, dût ce « treizième été » porter malheur à la sagacité des biographes à venir. Plus tard, elle reverra ses œuvres ; mais « le plus grand plaisir qui soit après amour c’est d’en parler, » et alors quel moment meilleur pour subir cette nouvelle tyrannie de Cupidon que celui où, libre de ses mouvements et maîtresse de ses pensées, elle se trouvera véritablement chez elle et assise à un foyer d’où