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ET LES ŒUVRES DE LOUISE LABÉ.


traire à ses habitudes ; ensuite ces vers ne veulent plus rien dire, et cependant ils disent des choses si ordinaires qu’il faut naturellement les traduire ainsi : Louise Labé n’est venue au monde ni dans une ville ni dans un château, mais à la campagne, en amont de Lyon et non loin de la Saône. La déesse sa mère lui prédit qu’elle lui donnera ce lieu comme un héritage qu’elle tient en son pouvoir, — en effet le pouvoir de Vénus est grand, surtout en matière d’héritage, — et que, dans cet endroit ou tout à côté, elle lui fera bâtir un château suffisant pour lui complaire, s’il lui plaît d’y séjourner.

Une prédiction de poète ne peut être menteuse, surtout quand elle est faite après coup. Dès lors, puisque Louise Labé est devenue propriétaire du lieu dans lequel elle fut « engendrée » à la lumière, il ne nous sera pas bien difficile de déterminer ce lieu. Nous verrons plus loin que la fille du cordier possédait une maison de campagne — un château, si l’on veut — « suffisant pour lui complaire, » puisqu’elle y a séjourné, puisqu’elle y avait son mobilier de choix, puisqu’elle tenait en particulière affection ses voisins, et puisque enfin elle y est morte ; que cette maison, suivant de sérieuses probabilités, lui avait été laissée par son mari, — c’est bien l’héritage que Vénus tient en son pouvoir, — et enfin qu’elle était située à Parcieu, en Dombes, c’est-à-dire en amont de Lyon, au-dessus d’un pré encore appelé aujourd’hui de la Cordière, et à quelques minutes de la Saône, dont on aperçoit,