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ET LES ŒUVRES DE LOUISE LABÉ.


Considérée comme source d’informations pour écrire son histoire, l’œuvre de Louise Labé doit se diviser en deux parties bien distinctes. La première, qui comprend la lettre à Clémence de Bourges et les élégies, — dont la deuxième est presque une autobiographie, — peut servir à l’étude de son existence, et la seconde, composée du Débat et des sonnets, à l’étude de son talent et de son caractère. À toute cette seconde partie de l’œuvre de notre écrivain nous ne demanderons pas autre chose, sachant que nul ne peut déterminer combien les faits de la vie réelle ont laissé de réalité et pris d’idéal en passant à travers les rêves et l’imagination de l’artiste. Nous croyons qu’il n’est pas absolument nécessaire au poète d’avoir, avec un de ses semblables dans l’autre sexe, de réelles amours dont il racontera l’histoire, pour qu’il soit à même de concevoir et d’écrire une œuvre fille de l’amour et de la beauté, une de ces œuvres dont nous avons l’habitude de dire qu’elles ont été vécues. Nous croyons que si la parole fut, comme on le dit, donnée à l’homme pour déguiser sa pensée, quand cette parole est écrite dans la langue des vers et surtout quand cette pensée est celle d’une jolie femme, il est bien dangereux de poser la main sur le fil léger de quelques vers avec l’espoir d’arriver par lui aux plus intimes secrets d’une existence.

Du reste, Louise Labé a pris soin de nous dire elle-même à quel point de vue il faut considérer ses écrits. Au moment où Jean de Tournes allait faire composer