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ET LES ŒUVRES DE LOUISE LABÉ.


Il m’a semblé qu’il y avait mieux à faire. J’ai pensé qu’il serait plus intéressant d’établir exactement les dires des contemporains, d’en détacher les broderies exécutées sur le canevas primitif par les biographes des siècles suivants, et de montrer, en s’aidant de quelques documents inédits, ce qu’a été l’existence de la Belle Cordière.

Louise Labé nous a laissé un petit volume, imprimé en 1555 par Jean de Tournes qui fut en son temps une des gloires de la typographie lyonnaise. Après une épître dédicatoire adressée à une toute jeune fille de grande famille, ce volume renferme un poème en prose intitulé, Débat de Folie et d’Amour, trois élégies et vingt-quatre sonnets. Avec ces seules pages, le nom de l’auteur est parvenu jusqu’à nous, accompagné des éloges de plusieurs célébrités de son temps, et il en a été ainsi malgré la jalousie des ignorants et des sots qui l’entouraient, les épigrammes de quelques amoureux éconduits et les fabliaux grivois de leurs successeurs, qui ont rendu méconnaissable cette intéressante physionomie.

Considérée au point de vue littéraire, l’œuvre capitale de Louise Labé est le Débat de Folie et d’Amour. Bien avant Sainte-Beuve, qui a remarqué la supériorité de la prose de la Cordière sur ses vers, Voltaire avait écrit : « La plus belle fable des Grecs est celle de Psyché ; la plus plaisante fut celle de la matrone d’Éphèse ; la plus jolie parmi les modernes fut celle de la Folie qui, ayant crevé les yeux à l’Amour, est condamnée à lui servir de guide. »