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ESCRIZ



 Mais ſa main ne ſera lente
 À te tourmenter auſſi.
 Prens bien à ce propos garde,
 Car ia deſia il te darde
 Son tret âpre & rigoureus :
 Dont il t’abatra par terre,
 Rendant d’un homme de guerre
 Ton tendre cœur amoureus.
En ce il prendra bien vengeance
 Du bon Poëte Rommain,
 Auquel ſans nulle allégeance
 Ton cœur eſt trop inhumein.
 Bien prendra à ta ieuneſſe
 Auoir apris à ſoufrir
 Des durs harnois la rudeſſe,
 Et à meint trauail s’ofrir :
 Souuent ſeras rencontrée
 Depuis la tarde veſpree
 Iuſqu’au point du prochein iour,
 Parmi les bois languiſſante,
 Et tendrement gemiſſante
 La grand’ cruauté d’Amour.
Alors pour eſtre aſſeuree
 Point en femme tu n’iras,
 Ains d’une lance paree
 Cheualier tu te diras.
 Ia en ton harnois brauante
 Ie te regarde aſſaillir
 Meint cheualier, qui ſe vante