Page:Labé - Œuvres, t. 1-2, éd. Boy, 1887.djvu/127

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
113
DE DIVERS POETES.



Las ! peu s’en faut qu’à ce petit ombrage,
 Reconnoiſſant ta bouche coralline,
 Et tous les trais de ta beauté diuine,
 Ie n’aye autant porté de témoignage.
Qu’uſt fait ce Grec ſi cette image nue
 Entre ſes bras fuſt Venus deuenue ?
 Que ſuis ie lors quand Louïze me touche,
Et l’accollant d’un long baiſer me baiſe ?
 L’ame me part, & mourant en cet aiſe,
 Ie la reprens ia fuiant en ſa bouche.



SONNET.



Ie laiſſe apart Meduſe, & ſa beauté,
 Qui tranſmuoit en pierre froide & dure,
 Ceus qui prenoient à la voir trop de cure.
 Pour admirer plus grande nouueauté :
Et reciter la douce cruauté
 De belle à soy, qui fait bien plus grand’choſe,
 Lors qu’en ſon tout grâce naïue encloſe
 Veut eſlargir ſa douce priuauté.
Car d’un corps fait au comble de ſon mieus,
 Du vif mourant contournement des yeus,
 À demi clos tournant le blanc en vuë :