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LOUISE LABÉ


doit chacune inciter : qui est autre que les autres recreacions ; desquelles quand on en ha pris tant que l’on veut, on ne se peut vanter d’autre chose, que d’auoir passé le temps. Mais celle de l’estude laisse un contentement de foy, qui nous demeure plus longuement. Car le passé nous réjouit, et sert plus que le présent : mais les plaisirs des sentimens se perdent incontinent, et ne reuiennent iamais, et en est quelquefois la memoire autant facheuse, comme les actes ont esté delectables. Dauantage les autres voluptez sont telles, que quelque souuenir qui en vienne, si ne nous peut il remettre en telle disposicion que nous estions : et quelque imaginacion forte que nous imprimions en la teste, si connoissons nous bien que ce n’est qu’une ombre du passé qui nous abuse et trompe. Mais quand il auient que mettons par escrit nos concepcions, combien que puis après notre cerueau coure par une infinité d’afaires et incessamment remue, si est ce que longtems apres reprenant nos escrits, nous reuenons au mesme