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[ch. xxvii.]
La Genèse.


vent, et que les tribus se prosternent devant toi : sois le seigneur de tes frères, et que les fils de ta mère se courbent devant toi : que celui qui te maudira, soit lui-même maudit ; et que celui qui te bénira, soit rempli de bénédictions.

30. À peine Isaac avait achevé ces mots, et à peine Jacob était sorti dehors, qu’Esaü arriva,

31. Et présenta à son père le mets qu’il avait apprêté de sa chasse, disant : Levez-vous, mon père, et mangez de la chasse de votre fils, afin que votre âme me bénisse.

32. Et Isaac lui demanda : Qui es-tu donc ? Il répondit : Je suis votre fils premier-né Esaü.

33. Et Isaac fut frappé d’une grande stupeur ; et surpris au delà de ce que l’on peut croire, il dit : Qui est donc celui qui m’a déjà apporté ce qu’il avait pris à la chasse, et que j’ai mangé, avant que tu vinsses ? Je l’ai béni, et il sera béni.

34. Esaü, les paroles de son père entendues, poussa un grand cri de fureur, et consterné, il dit : Bénissez-moi aussi, mon père.

35. Il répondit : Ton propre frère est venu frauduleusement, et il t’a enlevé ta bénédiction.

36. Mais Esaü repartit : C’est justement qu’il a été appelé du nom de Jacob ; car il m’a supplanté déjà une autre fois : il m’a enlevé auparavant mon droit d’aînesse, et maintenant il m’a surpris encore ma bénédiction. Et de nouveau : N’avez-vous pas, dit-il a son père, réservé aussi pour moi une bénédiction ?[1]

37. Isaac répondit : Je l’ai établi ton seigneur, j’ai soumis tous ses frères à sa domination, et je l’ai enrichi de blé et de vin ; mais pour toi, mon fils, après cela, que puis-je faire ?

38. Alors Esaü : Est-ce, lui dit-il, une seule bénédiction que vous avez, mon père ? Je vous conjure de me bénir aussi. Et comme il pleurait en jetant de grands cris,

39. Isaac ému lui dit : C’est dans la graisse de la terre et dans la rosée du ciel d’en haut,[2]

40. Que sera ta bénédiction. Tu vivras sur ton glaive, mais tu serviras ton frère ; et le temps viendra où tu secoueras et délieras son joug de ton cou.

41. Esaü haïssait donc toujours Jacob, pour la bénédiction dont l’avait béni son père ; et il dit en son cœur : Viendront les jours du deuil de mon père, et je tuerai Jacob mon frère.[3]

42. Cela fut rapporté à Rébecca, qui envoyant et appelant Jacob son fils, lui dit : Voilà qu’Esaü ton frère menace de te tuer.

43. Maintenant donc, mon fils, écoute ma voix, lève-toi et fuis chez Laban mon frère, à Haran :

44. Tu demeureras avec lui quelques jours, jusqu’à ce que s’apaise la fureur de ton frère,

45. Que cesse son indignation, et qu’il oublie ce que tu as fait contre lui ; après cela j’enverrai, et je te ramènerai de là ici : pourquoi serais-je privée de mes deux fils en un seul jour ?

  1. Gn. 27,36 : Voir Genèse, 25, 34.
  2. Gn. 27,39 : Voir Hébreux, 11, 20.
  3. Gn. 27,41 : Voir Abdias, 1, 10.