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CANTIQUE DES CANTIQUES

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OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES


1. L’expression Cantique des cantiques est un idiotisme hébreu qui signifie : le plus beau, le plus excellent des cantiques. Ce cantique, vrai chant d’amour, exprime les sentiments tout à la fois les plus ardents et les plus tendres, et respire toutes les douceurs de cette affection. C’est l’entretien d’un époux et d’une épouse qui s’expriment leur amour. L’un parait tour à tour sous les titres de berger, de roi, et sous le nom de Salomon, et l’autre alternativement sous ceux d’une bergère, d’une épouse, et elle porte le nom de Sulamite, qui est très vraisemblablement le féminin de Salomon. L’auteur introduit de jeunes vierges qui accompagnent l’épouse, et qui prennent plusieurs fois la parole, et de jeunes amis de l’époux ; mais ceux-ci ne sont que des personnages muets.

2. Nous regardons comme plus probable que ce cantique est purement allégorique, et qu’il doit être entendu uniquement de l’amour mutuel de Dieu et de son Église. C’est le sentiment de Théodoret, qui cite comme le partageant, non seulement Eusèbe, Origène, saint Cyprien et les Pères qui touchaient aux temps apostoliques, mais encore ceux qui sont venus après ces trois illustres docteurs. On a prétendu, il est vrai, que Salomon avait décrit d’une manière obscène les parties du corps de l’épouse ; mais, pour se convaincre du contraire, il suffit de remarquer : 1o que la simplicité du langage est toujours en proportion avec la simplicité des mœurs, et que, par conséquent, un peuple simple parle simplement et sans détour. Or, le peuple hébreu, qui était incontestablement dans cet état de simplicité naturelle, ne s’offensait nullement de certaines descriptions qui frappent et blessent nécessairement notre imagination corrompue ; 2o que dans l’Orient les hommes, ne vivant pas avec les femmes, s’expriment très librement entre eux, et ne connaissent pas cette réserve que nécessite, chez les Occidentaux, le mélange des deux sexes. Cette observation est aussi applicable aux femmes, qui, de leur côté, ne sont pas moins libres entre elles. De même que dans ces climats la nudité presque entière ne choque pas les yeux, de même aussi la plus grande liberté dans les expressions n’offense nullement les oreilles ; 3o que les descriptions qui nous paraissent trop libres ne sont pas mises dans la bouche des personnes étrangères, mais dans celle de l’époux et de l’épouse ou de ses compagnes, ce qui fait que le decorum est observé ; 4o que la plupart des peuples de l’Orient dépeignent l’amour mutuel de Dieu et de ses plus fidèles adorateurs sous des images empruntées de l’amour sensuel ; 5o enfin que, comme les personnages réels du Cantique sont Dieu et son