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Pour Paris, mes lecteurs n’auront trop rien perdu à mon absence, car dans cette première quinzaine aucune nouveauté n’a paru. Mais la seconde s’annonce comme devant être très remplie. Nous serons là pour rendre compte à nos lecteurs de tout ce qui peut les intéresser.

Mascarille.

Excellente soirée au théâtre Beaumarchais, M. Monza, le directeur, et M. Max, le secrétaire, ayant gracieusement mis un service de presse à la disposition de la Libre Revue. Applaudi Paul Legrand dans le Rêve de Pierrot, et M. Honoré Legrand dans les Domestiques, fort lestement enlevés par la troupe.

P. M.

MIETTE[1]

Patron Francet causait, expliquant à Georges la valeur et la légèreté de sa barque, lui vantant chaque cordage, chaque agrès. Georges écoutait d’un air distrait, ne quittant pas des yeux Miette et répondant comme il pouvait aux questions que le vieux marin lui adressait.

Et Miette chantait, et sa chanson lente et douce, parlant d’amour, allait jusques au cœur de Georges, où elle lui semblait trouver un écho :

Ieù té disieù, eando chatouno
Subré toun sen, sarro moun cor,
Car t’amaraï jusqu’à la mort
Coumou la vigno arno l’outouno

Et Georges, du bout des lèvres, sans trop savoir ce qu’il disait, murmurait avec elle :

Téms dis amour, dous souveni,
Perqué tant leù avès fini.

Ils étaient arrivés aux premières maisons de la Roquette.

— Où demeurez-vous donc, demanda Patron Francet.

— Nous vous descendrons où vous voudrez.

— Merci, répondit Georges, mais je descendrai là où vous descendrez vous-même.

— Oh ! nous n’allons pas probablement du même côté, nous, ajonta en riant le vieux marin, nous ne sommes pas d’Arles, nous sommes de Trinquetaille.

Georges regarda Miette. « À merveille, s’écria-t-il, j’ai justement affaire par là ! »

Il mentait effrontément.

  1. Voir le no 24. — Pour la reproduction ou la traduction s’adresser à l’administration du journal.