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Cazin est un grand paysagiste, original et intéressant. Mais, place-t-il des bonshommes dans un paysage de la banlieue de Paris, il donne à sa composition un nom tiré des histoires et des mythologies les plus lointaines : on a eu un exemple de ce système dans sa Judith du Salon de mai. S’il nous montre jamais un jeune indigène de Courbevoie jouant au palet sur le talus des fortifications, on lira dans le livret : Astyanax soulevant le bouclier d’Hektôr. Heureusement, cette petite manie n’ôte rien à la saveur de ses œuvres. On connaît son Ismaël. Il expose, en outre, la Chambre de Gambetta. Mes confrères des journaux quotidiens ont tous admiré « l’émotion que M. Cazin a su mettre dans cette petite toile. » Nous ne comprenons pas très bien. Il nous est arrivé une ou deux fois de feuilleter des catalogues illustrés de marchands de meubles, et jamais ce spectacle ne nous a fait sangloter : l’ébénisterie est sans action sur notre cœur.

L’exposition de Guillaumet est fort belle. Ses toiles sahariennes sont d’une touche grasse et sûre, d’un ragoût admirable. Ce n’est ni du Mârilhat ni du Decamps, — c’est du Guillaume !. Les Chiens dévorant un cheval mort sont d’une truculente férocité ; et le Champ labouré près de Gisors prouve que Guillaumet peint aussi bien sous le quarante-neuvième degré de latitude que sous le trente-cinquième.

Nous avons revu avec plaisir le tableau peut-être trop résolument monochrome où Fernand Cormon nous montre

… Kaïn le Vengeur, l’immortel Ennemi
D’Iahveh, qui marchait, sinistre, dans la brume,


comme dit le maître Leconte de Lisle.

(À suivre.)                                                                 FÉLIX-FENÉON.

CHRONIQUE DRAMATIQUE

Porte-Saint-Martin. — Rentrée de madame Sarah Bernhardt. — Reprise
de Froufrou, comédie en 5 actes de MM. Meilhac et Halévy.

Le 1er octobre 1851 paraissait le premier numéro d’une revue célèbre : la Revue de Paris. Les rédacteurs ordinaires s’appelaient Balzac, Théophile Gautier, Théodore de Banville, Maxime Du Camp, Arsène Houssaye, etc.

Dans le Liminaire, le maître Théophile Gautier développait les théories éclectiques, dont les fondateurs de la Libre Revue devaient s’inspirer trente années plus tard.