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HYMNE À L’ÊTRE SUPRÊME[1]

1794


Père de l’univers, suprême intelligence,
Bienfaiteur ignoré des aveugles mortels,
Tu révélas ton être à la reconnaissance,
        Qui seule éleva tes autels. (bis)

Ton temple est sur les monts, dans les airs, sur les ondes ;
Tu n’as point de passé, tu n’as point d’avenir,
Et sans les occuper, tu remplis tous les mondes,
        Qui ne peuvent te contenir.

Tout émane de toi, grande et première cause,
Tout s’épure aux rayons de ta divinité ;
Sur ton culte immortel la morale repose,
        Et sur les mœurs la liberté.

Pour venger leur outrage et ta gloire offensée,
L’Auguste Liberté, ce fléau des pervers,
Sortit au même instant de ta vaste pensée,
        Avec le plan de l’Univers.

Dieu puissant ! elle seule a vengé ton injure ;
De son culte elle-même instruisant les mortels,
Leva le voile épais qui couvrait la nature,
        Et vint absoudre tes autels.

Ô toi ! qui du néant, ainsi qu’une étincelle,
Fis jaillir dans les airs l’astre éclatant du jour,
Fais plus : verse en nos cœurs ta sagesse immortelle,
        Embrase-nous de ton amour.

De la haine des rois anime la Patrie,
Chasse les vains désirs, l’injuste orgueil des rangs,
Le luxe corrupteur, la basse flatterie,
        Plus fatale que les tyrans.

Dissipe nos erreurs, rends-nous bons, rends-nous justes,
Règne, règne au delà du tout illimité ;
Enchaîne la nature à tes décrets augustes,
        Laisse à l’homme la Liberté.


Desorgues.
(Musique de Gossec.)
  1. Voir la musique au supplément.