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LA

CATHÉDRALE

DE

MONTRÉAL.

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I.


Une circulaire de Sa Grandeur Mgr de Montréal, a été publiée dans La Minerve du 20 Sept. dernier et quelques autres feuilles, intimant aux fidèles du Diocèse que Sa Grandeur a décidé, après des années d’attente, de reconstruire sa cathédrale, et leur demandant leur aide à cette fin.

Que cette reconstruction soit bonne et utile en soi, nul ne le conteste, et il est très vrai qu’un Évêque, en règle générale, doit avoir une cathédrale, qui est regardée avec raison comme l’Église-mère du Diocèse et celle qui doit servir aux autres églises d’exemple, de modèle et de guide. Ainsi tout ce que Sa Grandeur dit à ce sujet est juste en principe et nous l’admettons de tout cœur.

Mais comme il s’agit ici d’une entreprise à laquelle tout le monde, c’est-à-dire, tous les fidèles du Diocèse, sont appelés à coopérer ; comme il s’agit aussi d’une entreprise qui touche non seulement à la religion, mais qui concerne assez directement les intérêts nationaux et sociaux de ces mêmes fidèles, et qui doit dans une grande mesure affecter assez directement la prospérité de la ville où elle va réaliser ; comme cette entreprise est de nature à augmenter ou diminuer le progrès moral et matériel des citoyens suivant le site adopté, nous pensons qu’il est permis aux intéressés de faire part au public de leurs vues sur l’ensemble de la question ainsi que sur le choix, à notre avis très malheureux, du site qui a été assigné à l’érection de cette cathédrale.

D’abord il est un fait considérable dans la question et qui doit frapper les yeux les moins clairvoyants.

Sa Grandeur n’a jamais jugé à propos d’avoir le moindre rapport avec les citoyens, de provoquer la moindre consultation avec ses diocésains, sur cette importante question. Au contraire Sa Grandeur a décidé exclusivement dans sa sagesse personnelle tout ce qui a eu rapport au choix du site, comme si cette question était purement religieuse ; et pourtant, dans la position toute particulière où se trouve la ville de Montréal, une pareille question devenait au moins autant nationale que religieuse. Mais nous avons toujours souffert l’arbitraire sans mot dire ; nous avons toujours permis à l’autorité ecclésiastique d’agir sans nous et souvent malgré nous dans les questions qui ne sont pas exclusivement de sa compétence, et nous voyons cette abdication morale culminer en une faute prodigieuse commise par l’autorité diocésaine. Tout le monde voit la faute, et personne n’ose dire un mot tant on a réussi à emmailloter l’opinion. Nous croyons pourtant pouvoir démontrer à la satisfaction de tous les esprits non préjugés que sous les deux rapports religieux et national, le site choisi est précisément celui qui méritait le moins de l’être.