Page:La belle Cauchoise, 1788.djvu/62

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 56 —


n’est pas si sémillant qu’avec ceux dont la conversation et la compagnie sont si instructives et amusantes. Celui dont je parle venait chez moi presque tous les jours, avec une froideur qui me faisait peine ; j’aurais souhaité qu’il m’eût distinguée des autres femmes. J’avais beau l’agacer, rien ne l’échauffait, je ne pouvais me cacher l’amour que j’avais pour lui, tout le monde s’en apercevait ; il paraissait être le seul qui fermât les yeux là-dessus. J’avoue que cette indifférence me mit absolument hors des gonds ; je ne concevais pas comment le comte, car il l’était très-réellement, pouvait s’empêcher de répondre à mon amour. Je me croyais pour le moins aussi aimable que lui, mon amour-propre y était offensé, et il y allait de ma gloire de faire rendre les armes au comte. Toutes les femmes, et particulièrement celles de mon éminente profession, sont faites ainsi : Plus on est indifférent pour elles, plus elles cherchent à se faire aimer, elles mettent même audacieusement tout en usage pour cela.

C’est en effet ainsi que je pensais quand je résolus d’écrire au comte ; je n’étais pas