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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

Elle m’interroge sur la Russie, sur la famille du grand-duc Alexandre, sur le Palais d’Hiver. Oh, ce Palais d’Hiver où elle aurait tant voulu aller en représentation, pour jouer devant le Tsar. Elle prononce Czar, en appuyant sur le C…

— Et pourquoi avez-vous quitté le grand-duc, la Russie ?

Je ne sais que répondre. Dame, je ne peux pourtant pas lui dire… Et je rougis, je rougis comme une coupable.

Elle insiste. Est-ce que par hasard le grand-duc…

Mon trouble augmente. Je ne sais où me mettre. Et cela l’intéresse prodigieusement, la vieille libidineuse.

— C’est ça, n’est-ce pas ? Et vous êtes partie à cause de ça, hein ? Pauvre enfant.

Je fais involontairement un signe affirmatif.

— Moi, à votre place… Ah ! oui, alors…

D’abord, je serais restée, et puis… et puis… Vous me comprenez !

Je ne comprends que trop. Elle l’aurait fait chanter, le grand-duc, parbleu. Mais peut-être ne se serait-il pas laissé faire.