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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

continuait ; les courbettes se succédaient ; la salle s’emplissait de nouveaux visages. Un brouhaha léger fait des mille conversations futiles qui s’élevaient des groupes, du froissement des soies lourdes et du cliquetis des éperons et des décorations, emplissait la vaste salle.

Toutes des femmes étaient décolletées. Les princesses, les duchesses, les comtesses et les dames de la haute aristocratie pétersbourgeoise arboraient presque toutes le splendide costume national des boyarin, composé de lourd brocart frangé d’or et pailleté d’argent, avec le long voile blanc qui tombait du kokochnik où s’allumaient les feux des diamants, des rubis et des perles. Les étrangères étalaient les toilettes merveilleuses des grands couturiers parisiens ; c’était, sur les seins nus, dans les chevelures brunes et blondes, aux poignets et aux doigts, un débordement, un écroulement de bijoux, où les brillants prédominaient ; un chatoiement attirait l’œil à chaque mouvement de la foule ; les éventails en plume blanche avaient un geste lent et doux comme une caresse timide sur le satin des épaules. Telles des fées souples et provo-