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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

Très souvent, la nuit, on rapporte le grand-duc ivre-mort à la maison. Il fait la fête avec des cocottes, dans les restaurants, chics, et l’aube blanchit d’ordinaire les vitres lorsqu’on le ramène. C’est alors un vacarme infernal dans les grands escaliers sonores. Le grand-duc crie, jure et tempête ; les hommes qui le soutiennent, des cosaques le plus souvent, crient plus fort que lui ; les valets s’effarent, claquent les portes, renversent des potiches, et cela dure jusqu’à ce que l’ogre, vautré dans son lit, se mette à ronfler en cuvant sa cuite ; le lendemain, il a l’air abruti, assommé ; et le soir, la fête recommence pour se terminer de la même façon.

À deux reprises, paraît-il, le grand-duc a eu des attaques de delirium tremens et la dernière fois, il a même détérioré un de ses cosaques. Ah ! je comprends que ses fils tremblent de peur lorsqu’il est là ; pauvres gosses, pauvres petits princes, quel exemple, quelle éducation !

Ils sont cependant bien gentils. Serge, l’aîné, adore l’étude ; il est déjà très savant et parle le français avec une grande facilité. Ses professeurs d’histoire et de mathématiques sont