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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

ma mère se sont retrouvés, dans le lit nuptial de l’éternité.

L’année a passé comme un rêve. J’ai pleuré. Ah ! tu le sais, combien j’ai pleuré ! Alors que le ciel était bleu et pur, il me semblait à moi gris et chargé de nuages. Alors que les oiseaux gazouillaient leurs plus joyeux refrains, il me semblait à moi qu’ils pleuraient d’amères larmes et que leurs cris s’élevaient vers le ciel comme une prière. Pour moi, les fleurs n’eurent plus de parfum, le miel n’eut plus de saveur.

Tout était mort, avec mon père !

Petit journal, écoute… une grande nouvelle ! Je quitte le presbytère. Conçois-tu cela ? Eh oui, c’est décidé ; oh ! depuis hier seulement. Que veux-tu, il le faut. Et nous allons loin, loin ; tous les deux, si loin que je frissonne, par delà le monde civilisé, en Russie !

Mais avant de songer au départ, viens avec moi, petit journal, faisons encore une fois, une dernière fois, le tour de la maison, du jardin, des bosquets ; allons partout où j’eus coutume de rêver et de rire. Mon domaine est