Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/209

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
201
LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

liette, elle a des soucis, et tu comprends…

C’est vrai, aussi, rien ne va. Depuis quinze jours, je n’ai pas vu un chien de client ; je ne gagne plus rien ; l’autre mois, j’ai fait quarante francs en tout, et il faut vivre cependant. Georges ne sait rien ; je lui cache mes ennuis, car il se ferait du mauvais sang, le chérubin, et moi je ne veux pas. Je tâche de faire aller mon ménage, au petit bonheur, mais j’ai bien de la peine quelquefois et je ne sais pas comment ça finira si je ne travaille plus.

Les premiers temps, j’avais eu de la chance, plusieurs bonnes clientes qui payaient largement ; mais elles sont parties à la campagne, et depuis, je n’ai eu que de loin en loin un massage insignifiant. Et cependant, on dit partout que les masseuses sont très courues, très demandées. Pourquoi donc ne vient-on pas chez moi ? Je suis pourtant bien consciencieuse, je connais bien mon affaire et puis, je suis jeune, presque jolie, très aimable avec les clientes…

C’est du guignon, tout de même ! Moi qui croyais être enfin tranquille, voilà que tout craque. Je n’ose demander du crédit chez le