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AVANT-PROPOS.

Qunad une honorable confiance voulut bien nie charger de remédier aux lacunes que la mort a empêché Le Gonidec de combler dans ses œuvres philologiques, et de surveiller l’exécution matérielle du monument dont ce volume forme la seconde partie, je crus devoir en couronner le fronton, si j’ose l’appeler ainsi, par un Essai sur l’Histoire de la langue bretonne. Imprimé et publié peu après le premier volume, comme il devait l’être, celui-ci n’eût pas eu besoin d’introduction : l’Essai qui précède le Dictionnaire français-breton avait été composé dans le but de les ouvrir tous les deux ; mais la révolution de Février en ayant retardé la mise au jour jusqu’à ce moment, a rendu nécessaires quelques nouvelles observations préliminaires, et il me semble à propos de résumer brièvement les points principaux que j’ai touchés dans le préambule de l’autre Dictionnaire. Ces points qui, d’après les meilleurs juges en pareille matière, seraient désormais prouvés, les voici :

La langue bretonne représente, sous plusieurs rapports essentiels, l’ancienne langue celtique, dont elle a conservé en partie le Vocabulaire et la Grammaire, et doit être regardée, avec l’idiome national des Bretons-Gallois et celui que parlent les Gaëls d’Irlande et d’Écosse, comme un débris plus ou moins altéré du celtique[1].

Ce débris recueilli et protégé en Armorique, y a eu son époque brillante du ve au xiie siècle, période où le breton était la langue usuelle des chefs nationaux et de leurs cours.

Déclinant avec la nationalité bretonne, du xiie au xve siècle, il a eu sa première période de décadence, durant laquelle, altéré et modifié par l’influence croissante du français, puis banni de la Haute-Bretagne, il n’a plus été en usage que dans les évêchés de Vannes, de Tréguier, de Quimper et de Léon.

  1. D’après une découverte récente et de la plus grande importance de M. Jacob Grimm, le gaël-irlandais serait le dialecte qui a le mieux conservé l’empreinte primitive. L’illustre philologue allemand a trouvé, grâce à ce dialecte, le sens de trois vers cites par Marcellus Burdigalensis, écrivain du ive siècle, comme appartenant à la langue rustique des environs de Bordeaux, et qui sont du pur irlandais. (Voyez son Mémoire intitulé : Uber Marcellis Burdigalensis, gelesen in der Akademie der Wissenschaften, 28 Juin 1817. p. 27.— Berlin, 1849)