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apprennent à n’avoir jamais ni chaud ni froid, à rester debout toute une nuit sans manger et à boire tout le temps sans se griser. Elles commencent très jeunes leur métier de petites danseuses-mimes et espiègles. Ce n’est pas un brevet de vertu d’être geisha, mais ce n’est pas nécessairement métier de courtisane, il y a beaucoup de tentations ; on peut y résister. À 25 ans on prend sa retraite, on accompagne et on dresse les petites si on n’a pas trouvé à se marier. Tout ceci montre que les Japonais aiment à s’amuser et n’ont rien d’ascétique dans le tempérament, rien de trop grossier ni de brutal non plus.

La patience est une grande vertu japonaise et si entrée dans les mœurs, qu’en manquer est tout à fait une honte et une humiliation, il n’y a que les étrangers qui se fâchent quand on les contrarie comme les très petits enfants. C’est un grand signe d’infériorité au Nippon de n’être pas maître de soi en toute circonstance, de s’agiter quand on attend, de se plaindre quand on souffre, de regimber quand on vous contrarie, de pleurer en public quand on a du chagrin, de passer devant quelqu’un quand on est pressé. Enfin, trait caractéristique, il n’y a pas de mots pour jurer. Et il ne s’agit pas d’une résignation morose et sourdement révoltée, il faut avoir une patience souriante,