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pas d’être fidèle mais d’obéir de bonne grâce à son père d’abord, à son mari et à ses beaux-parents ensuite. Autrefois même les parents les plus nobles vendaient leurs filles au Yoshiwara pour sauver la famille de la ruine, et la jeune fille passait pour une héroïne de la piété filiale et non pour une créature perdue. Aujourd’hui, il n’y a plus guère que les basses classes qui se livrent à ce trafic.

Du reste c’est un aperçu intéressant de la morale d’un peuple que la façon dont il envisage le terrible problème de la prostitution. Tant s’en faut que les pays qui se nomment eux-mêmes civilisés l’aient résolu à leur honneur. Les Japonais prennent cela fort simplement, ils ne prétendent pas ignorer cette plaie inévitable, ils ne cherchent pas à la cacher, mais ils la réglementent fortement. Dans un pays où il y a des préceptes impératifs pour tout, il y en a et combien pour ce genre de choses. Depuis plusieurs siècles, les courtisanes sont contraintes d’habiter un quartier ou des rues spéciales, elles doivent attendre l’occasion derrière des grilles et sous aucun prétexte ne peuvent courir après les passants. Cela donne aux rues japonaises le soir une apparence de décence que Londres et Paris sont loin de connaître. Ce n’est pas que les Japonais aient honte de ce genre de nécessité : en