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toyens. Un jour de sortie, il présente sur la voie publique sa pétition au shogun qui la reçoit et le fait aussitôt mettre en prison (il y a quelque chose dans la logique japonaise qui ne s’accorde pas bien avec la nôtre). Le seigneur, admonesté de faire son devoir envers ses paysans, supprime immédiatement toutes les surtaxes et vexations qui pesaient sur ses sujets, et se faisant livrer Sogoro, qu’on lui remet sans difficulté, le condamne sans appel à être crucifié, lui, sa femme, et ses quatre fils, de 13, 10, 8 et 4 ans. Divers amis de ce seigneur vindicatif insistent bien pour faire adoucir la sentence, mais en ce qui concerne la femme et les enfants seulement. Tout le monde s’accorde à reconnaître que Sogoro mérite la mort. Les chefs des 336 villages qu’il a sauvés au prix de sa vie pétitionnent aussi pour obtenir la grâce de la femme et des enfants, mais non point de Sogoro qui évidemment doit souffrir sa peine. Et comme le seigneur est inébranlable dans sa cruauté, l’héroïque Sogoro, son infortunée femme et ses quatre garçons sont exécutés au milieu d’une foule en larmes qui leur jette des fleurs et les adore comme des dieux. Détail effroyable qu’il ne faut pas omettre, les quatre enfants sont décapités un à un (le petit de quatre ans aussi) sous les yeux de leurs parents avant que ceux-ci soient tués à coups de lance !