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employé, il doit la même soumission à ses chefs ; sujet, il appartient corps et âme à son empereur, et sait dès ses plus tendres années que le sort le plus désirable et l’honneur le plus grand c’est de donner sa vie pour son souverain. Il appartient encore à ses ancêtres et ni pas le droit de les déshonorer ni de laisser éteindre sa lignée, ce qui les priverait du culte nécessaire. L’extrême docilité d’esprit que tous ces devoirs impliquent repose en partie sur le fatalisme conscient ou inconscient de l’Orient tout entier, sur les préceptes de Confucius qui prêche le respect filial porté à ses dernières limites et sur le bouddhisme qui fait une vertu du contentement de son sort. Confucius et le Bouddha ont apparemment trouvé dans le Japonais un terrain d’élection, car nulle part on ne voit la soumission à toute autorité visible ou invisible poussée si loin.

Un autre commandement non écrit de la morale japonaise c’est le mépris de la vie, et l’art de mourir est poussé dans ce pays jusqu’à ses plus exquises limites. Il y a tant de choses que l’on doit préférer à sa propre vie, qu’il ne reste à celle-ci qu’une valeur tout à fait relative et précaire ; on est toujours prêt à la quitter, on sait fort exactement quand il convient de mourir et de quelle façon il est digne et élégant de