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n’importe pas à la vie de tous les jours. Qu’il a la religion douce, superficielle et gaie, et que le seul dieu qu’il serve, c’est celui dont il attend du bien. Au fond son seul vrai dieu, c’est lui-même en la personne de ceux de sa race qui sont morts ; à son tour il deviendra dieu en allant les rejoindre et recevra de ses enfants le culte qu’il a rendu à ses parents. Bouddhiste ou shintoiste, il ne songe pas à disparaître en mourant, mais à assurer sa survivance. La mort n’est pour lui ni une délivrance ni une épouvante, c’est une transformation, ce n’est pas une fin mais un changement très modique d’état. Il ne quitte point les siens, ni sa maison, ni sa paroisse, ni son pays, il hante la tablette qui porte son nom, boit le thé qu’on lui verse, mange le riz qu’on lui sert, entend les paroles qu’on lui adresse et n’est pas sans moyens d’influence sur la direction de son ancienne maison. Bon dans la vie physique, il devient un esprit bienfaisant ; méchant, il devient dangereux, et les vivants s’efforcent de l’apaiser ; de toute façon il continue à vivre à l’état d’ombre à peu près comme il avait vécu. Au bout d’une centaine d’années, il revient ou il va au ciel pour un temps. La vie actuelle ne lui semble pas très importante, ce n’est ni un commencement ni une fin, on la quitte facilement, mais on ne la passe pas à se tourmenter