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débarrasse sur les nattes devant le Bouddah de tout ce qui l’encombre, s’assoit sur ses talons, jette deux centimes, quelquefois dans la grande boîte qui sert de tronc, quelquefois à côté, c’est selon sa chance et son coup d’œil, puis joignant les mains et baissant la tête, elle joue à prier le bon Dieu tout à fait gentiment. L’oraison n’est pas longue, et il se trouve bien là quelque voisine avec qui bavarder, ou bien le bébé a besoin d’être rajusté, ou un paquet demande à être refait. Tout cela se passe avec une extrême simplicité qui exclut l’idée d’irrévérence. Il y a dans le temple de quoi fumer, de quoi prendre le thé, ce n’est pas un endroit où on a l’air confît, les enfants y jouent, ils y dorment ou ils tètent, c’est comme çà se trouve. Les Japonaises ne voient pas d’inconvenance à remplir devant le monde leurs fonctions prolongées de nourrices. Des petits qui courent tout seuls se précipitent soudain sur leur maman, ouvrent son kimono, montrant à qui veut les voir de petits seins qui pendent en gourdes étroites, puis se mettent à sucer comme des chevreaux entre les jambes d’une chèvre ; quelque chose les distrait, ils s’arrêtent jouant avec les petites poches à lait qui me paraissaient toujours bien flasques, et le grand Bouddah doré poursuit sans émotion son interminable méditation. Une Japonaise passe derrière