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dure et le charme de ses eaux courantes. C’est la pluie qui transforme en jours de fête les rares beaux jours et qui fait un événement des floraisons successives quand elles peuvent avoir lieu. C’est probablement à la pluie qu’il faut attribuer l’abondance de poisson. C’est la pluie qui empêche les fleurs d’avoir du parfum et qui habille les vieux bouddhas d’un si doux velours vert ; elle qui patine le bois des maisons et la laque rouge des temples. Elle qui a fait inventer les jardins ornés seulement de pierres et d’arbrisseaux : une pierre luisante n’est pas laide sous une averse, mais que dire d’un rosier trempé ? On n’aurait point élaboré les interminables cérémonies de thé dans un pays ensoleillé, ni tant prolongé les parties de go si on pouvait sortir quand on veut. Un touriste exaspéré par ces déluges aurait le droit de mettre la pluie en avant pour tout expliquer, ce qui lui plaît et ce qui l’irrite, le charme du pays et le sourire figé de ses habitants.

Quelque chose de plus frappant encore que la pluie : l’absence de troupeaux. Point de vaches rentrant le soir du pâturage ou ruminant dans un pré en vous regardant avec un étonnement placide. Point de chevaux pris de gaîté dans un paddock. Point de chèvres