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nouvelle. Il semble que la nature humaine devrait être la même partout et que quelque chose de si spontané que le rire ou les larmes dût se manifester toujours à propos des mêmes choses. Il n’en est rien au Nippon : on y est tellement maître de son sourire et l’étiquette est tellement loin de la nôtre, qu’elle prescrit l’hilarité dans des circonstances où elle nous paraît extrêmement déplacée. On est jeté hors des gonds par le rire persistant d’un domestique qu’on gronde : plus on insiste, plus il rit, et si l’exaspération va jusqu’au geste de menace, le Japonais se tord. Toute patience échappant enfin, si on en arrive à frapper, il recule pour se mettre à l’abri, mais il rit toujours ! C’est à devenir fou, mais il paraît que ce malheureux Japonais n’a pas l’intention de nous manquer de respect ; il doit continuer à montrer une figure souriante même à qui le maltraite.

Lafcadio Hearn, qui a étudié le Japon de si près et avec tant d’amour, raconte l’histoire étrange d’un résident anglais de la première heure qui prenait des leçons avec un ancien samourai (noble). Au cours d’une discussion, l’Anglais, outré par l’imperturbable sourire, s’oublia jusqu’à le souffleter. Le samourai se retira et… s’ouvrit le ventre. Très impressionné par ce dénouement tragique et imprévu, l’Anglais s’in-