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fumer les siennes et non les vôtres au moins pour commencer : il ne veut pas vous priver de votre bien pour ménager le sien.

Mais la question n’est pas tant de savoir si les Japonais ont tort ou raison que de constater que leur instinct est différent et leur manière de raisonner aussi. Cela prouve que leur esprit n’envisage pas les choses du même point de vue, qu’il ne part pas du même point de départ, et qu’il ne chemine pas par les mêmes routes. L’instrument est différent et on en joue d’autre façon. Cela explique aussi pourquoi Européens et Japonais se sentent mal à l’aise vis-à-vis les uns des autres et pourquoi ils se comprennent si mal.

On ne peut les juger ni d’après soi ni d’après d’autres peuples dont le diapason semble plus rapproché du nôtre. Pas même d’après nos bêtes domestiques qui nous ressemblent plus que lui.

Ce qu’il y a peut-être de plus troublant dans la pratique, c’est que le Japonais rit quand nous prenons l’air grave ou quand nous nous mettons en colère. Cela nous choque de voir notre interlocuteur ricaner quand nous lui posons une question sérieuse sur un sujet important, religieux par exemple, ou éclater de rire quand on lui annonce qu’on a reçu une mauvaise