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pronoms personnels, il y avait autrefois un je spécial pour toutes les classes de la société, et il reste encore 16 façons de dire toi. Tout est à la fois simple et compliqué, simple parce qu’il n’y a pas d’abstractions ni de métaphores, compliqué parce qu’il faut éviter toutes les tournures personnelles et connaître toutes les nuances des formes honorifiques. Certaines choses restent nobles dans toutes les circonstances, comme ce petit thé qu’on vend dans les gares, théière et tasse comprises, pour trois sous, qui s’appelle Thonorable thé, Ocha. Une petite paysanne s’appelle O Tomi San, l’honorable mademoiselle Fortune, à supposer que San veuille dire mademoiselle ; c’est Tomi qui le donne à penser, car San veut dire également Monsieur, Madame et même bébé. Baby San sert de petit nom à tous les enfants de résidents européens qui ont une bonne japonaise. Il y a beaucoup de mots pour les choses de la Nature, on en parle souvent, et avec détails. Mais la Nature n’est jamais personnifiée, on ne lui prête pas une âme et des sentiments ; on décrit ses aspects et les sensations qu’ils éveillent chez l’observateur.

Il résulte de tout cela que le japonais est une langue à la fois sentencieuse et terre à terre. Sa construction impersonnelle lui donne toujours un air de proverbe