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Je ne retrouve pas beaucoup plus César dans Iyéyasu que Napoléon dans Hidéyoshi, mais je vois dans ces quelques lignes un portrait qui me semble bien tracé de l’idéal japonais. Courage et science militaire, art de dissimuler, d’attendre, mettons de mentir (la diplomatie c’est bien cela, n’est-ce pas ?), empire absolu sur soi-même, cruauté à l’occasion, beaucoup de philosophie appliquée et un grand souci de l’avenir du pays. Pas d’enthousiasme, de pose, de poudre aux yeux, et rien d’inutile, toutes qualités pratiques et pas très élevées. Écoutons-le parler lui-même pour ne pas lui faire tort : voici d’abord des préceptes qu’on lui attribue et qui décorent un kakémono que j’ai acheté dans la cour de l’admirable temple de Nikko, qui suffirait à immortaliser son nom :

« La vie est semblable à un long voyage qu’il faut faire en portant un lourd fardeau. Marche lentement et d’aplomb pour ne pas broncher.
« Persuade-toi bien que les imperfections et les ennuis sont l’apanage naturel de la nature humaine et tu ne connaîtras plus le mécontentement et le désespoir.
« Rappelle-toi les jours d’adversité que tu as traversés quand les désirs ambitieux s’élèveront dans ton cœur.