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Dans leur nouvel habitacle, Faustus et Stella sont charmés par les sons, les formes et les couleurs. Je n’aurais pas cru qu’étant immortels ils pussent goûter le plaisir de voir et d’entendre. Voir, entendre, sentir, n’est-ce pas user quelque chose de soi-même, n’est-ce pas déjà un peu mourir ? Et qu’est-ce que vivre comme nous vivons sur la terre sinon mourir sans cesse et dépenser tous les jours une part de la quantité de vie qui est en nous ? Mais la vision du poète est si pure et son art si subtil, que nous sommes transportés et ravis.

Stella révèle à Faustus la plus haute expression de la musique. Il goûte le charme de la voix dans une extase heureuse qui lui fait oublier sa vie passée. Stella qui jusqu’alors lui était apparue sous sa figure terrestre, revêt devant lui sa parfaite beauté. Ils échangent leur amour dans une communion sublime.

Voilà leur bonheur ! Mais comment donc peuvent-ils le goûter, s’ils sont immortels ? Nous avons l’amour sur la terre, mais c’est au prix de la mort. Si nous ne devions pas périr, l’amour serait quelque chose d’inconcevable. À peine Faustus a-t-il pressé Stella dans ses bras rajeunis qu’il devient distrait et songeur. Son bonheur a-t-il duré un jour ou des milliards de siècles ? On ne sait, et lui-même il l’ignore. Un bonheur sans mélange ne saurait être mesuré. Celui même qui le possède ne le goûte ni ne l’éprouve. Quoi qu’il en soit, la curiosité, un moment assoupie par les délices de la vie paradisiaque, se réveille en Faustus. Il aspire à comprendre