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LA VIE LITTÉRAIRE.

titre l’indique, le mémoire d’un accusé. Mais on devinait le philosophe sous le romancier, on voyait la thèse dans l’œuvre d’art. L’Affaire Clémenceau contenait en germe l’Homme-Femme et la Femme de Claude. Ai-je besoin de rappeler qu’il s’agit, dans le roman, d’un enfant naturel, du fils d’une pauvre fille abandonnée, qui travaille pour vivre ? Clémenceau n’a jamais connu son père. Il est encore tout petit quand, à la pension, ses camarades lui font honte de sa naissance. Il est beau, il est fort, il est intelligent et bon. Dès l’enfance, son génie se révèle : conduit par hasard dans un atelier de sculpteur, il reconnaît sa vocation. Il est destiné à pétrir la glaise ; il est voué au tourment délicieux de fixer dans une matière durable les formes de la vie. Le travail le garde chaste. Mais jeune, ignorant et vigoureux, il est une proie dévolue à l’amour. Une nuit, dans un bal travesti, il rencontre une enfant, habillée en page et qui accompagne une abondante et magnifique Marie de Médicis, sa mère. Iza, cette enfant, est parfaitement belle. Mais ce n’est qu’une enfant. D’ailleurs elle n’a fait qu’apparaître comme un présage. Elle s’en est allée avec sa mère, la comtesse Dobronowska, une aventurière polonaise, chercher fortune en Russie. La comtesse, ne pouvant la marier, essaye de la vendre. Iza lui échappe et, soit amour, soit fantaisie, elle vient demander asile au sculpteur Clémenceau, qui est devenu célèbre en peu d’années. Il l’attendait. Il l’épouse, il l’aime. Il l’aime d’un amour à la fois idéal et esthétique. Il l’aime parce qu’elle est la forme parfaite et parce