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soit plein d’idées. Jusqu’ici il n’est bourré que de faits. Les instituteurs d’autrefois voulaient, avec raison, qu’on ménageât la mémoire des enfants. L’un d’eux disait : « Dans un réservoir si petit et si précieux on ne doit verser que des choses exquises. » Bien éloignés de cette prudence, nous ne craignons pas d’y entasser des pavés. Je n’ai pas vu Loulou seulement au buffet et mangeant des pêches. Je l’ai vue encore courbée sur son pupitre, pâle, myope et bossue, écrasée de ces noms propres qui sont les vanités des vanités.

Loulou subit en grognant cette incompréhensible fatalité. Résignez-vous, Loulou. Cette nouvelle barbarie est passagère. Il fallait qu’il en fût d’abord ainsi. La plupart de nos sciences sont neuves, inachevées, énormes, comme des mondes en formation.

Elles grossissent sans cesse et nous débordent. En dépit de tous nos efforts, nous ne les embrassons pas ; nous ne pouvons les dominer, les réduire, les abréger. Nous n’en possédons pas la loi générale et la philosophie. C’est pourquoi nous les faisons entrer dans l’enseignement sous une forme obscure et lourde. Quand nous saurons dégager l’esprit des sciences, nous en présenterons la quintessence à la jeunesse. En attendant, nous y déchargeons des dictionnaires. Voilà pourquoi, Loulou, la chimie qu’on vous apprend est si ennuyeuse.