Page:La Vie littéraire, II.djvu/240

Cette page n’a pas encore été corrigée

l’archaïsme. J’ai vu, il y a deux ans, M. Jean Moréas composer un lexique à son usage avec des termes tombés en désuétude depuis la reine Claude et la duchesse Marguerite. C’est écrire à plaisir dans une langue morte, quand il y a tant de joie à parler toute vive notre aimable langue française. Elle est si douce et si fraîche, si heureuse, si alerte ! elle est si complaisante, quand on ne la violente pas ! Je ne croirai jamais au succès d’une école littéraire qui exprime des pensées difficiles dans une langue obscure.

Ne tourmentons ni les phrases ni les pensées. Ne nous imaginons pas que les temps sont venus, que les vieilles littératures vont tomber en poudre au son des trompettes angéliques, et qu’il faut de nouveaux éblouissements à l’inquiet univers. Les formes d’art qu’on fabrique de toutes pièces dans les écoles sont généralement des machines compliquées et inutiles. Surtout ne proclamons pas trop haut l’excellence de nos procédés. Il n’y a d’art véritable que celui qui se cache.